mercredi 12 mai 2010

L'interactivité, ce nerf de la guerre, est-il soluble dans tout?

Vous me direz, pour un premier post, j'aurais pu choisir plus simple et moins risqué! Mais rien de tel en guise de bain moussant inaugural que de s'attaquer à l'une des questions essentielles qui animent la planète media global ces derniers temps: l'interactivité ou, comment le transmedia place le spectateur/joueur au coeur du dispositif?

Comme le rappeler John Tarnoff dans son excellent article l'an passé, l'interactivité est très certainement l'enjeu principal qui départagera dans les mois et les années à venir les "bons" des "mauvais" projets transmedia (ou, pour parler un langage plus communément admis dans les sphères artistiques, les propositions "intéressantes" de celles "pas encore abouties"...)

Mais de quoi parle-t-on au juste? J'ai toujours été surprise de voir à quel point cette question centrale pâtissait encore d'une sorte de flou artistique une fois venu le temps d'élaborer des propositions concrètes sur lesquelles pouvait reposer une interactivité réelle. La problématique est d'autant plus difficile à cerner qu'elle sous-entend une "individuation" du process narratif et une appropriation de ses schémas par le spectateur/joueur. Or, ces deux données semblent profondément incompatibles avec la culture de masse, ou pour moins choquer, avec l'entertainment élaboré pour le plus grand nombre.

L'argument pourtant est très séduisant. Qui, en jouant à In Memoriam par exemple, n'a pas littéralement fondu en croyant, l'espace d'un instant, être au coeur même de cette terrible machination? Mais pour un projet avançant une tentative séduisante (même si elle restait encore balbutiante), combien de fictions transmedias croiront faire de l'interactivité en proposant l'air enjoué des bonus à choisir dans le désordre comme sur un vulgaire dvd?

L'idée de ce billet inaugural m'est finalement venue en lisant Eric Viennot aujourd'hui. Dans son post, le créateur d'In Memoriam fait un lien savant entre le digital storytelling et l'information, le journalisme, et le webdocumentaire... Fort heureusement, beaucoup d'entre nous (et de vous aussi, sans doute :)) ne l'ont pas attendu pour y songer, mais sa réflexion autour de prison valley (ce webdoc de Philippe Brault et David Dufresne produit par Upian dont tout le monde parle en ce moment) a le mérite de poser clairement les bases de la réflexion.

Eric Viennot nous dit avoir été "happé pendant plusieurs heures par ce reportage d'un nouveau genre" et salue avec force "la façon dont il motive le dialogue entre internautes, ou mieux encore, avec quelle magie il nous permet d'entrer directement en contact avec ses protagonistes".

J'aime bien quand Eric Viennot nous parle de "magie".......

Mais revenons à l'essentiel et brisons un peu cette chaîne de liesse et d'espoir qui entoure Prison Valley depuis sa mise en ligne. Car, quand Eric Viennot et ses amis nous parlent de "délinéarisation", je ne vois personnellement qu'un documentaire linéaire produit et pensé pour la télévision et entrecoupé de "bonus" aux allures de gadgets. A mes yeux, Prison Valley est un bon sujet de documentaire mais comme on le dirait d'un docu de 52 minutes qui passerait sur France 5 ou Arte en après-midi. Bon sujet, bien réalisé, servi par des images absolument magnifiques mais dont ni le propos -le monde carcéral américain n'étonne plus personne, rien a apprendre de ce côté-là, ni la facture version nouveaux médias - un vrai-faux découpage à la jeu vidéo- ne sauraient nous surprendre.

Et qu'en est-il de l'interactivité, ce nerf de la guerre? Les tentatives mises en place par Prison valley sont intéressantes: une communication "latérale" entre les spectateurs du webdocu (la vraie innovation!) et des forums et des tchats avec les personnages ou des experts (là, rien de nouveau). Pour le grand choc et l'interactivité version transmédia, il faudra patienter encore un peu...


1 commentaire:

  1. Bonjour !

    Je me permets un petit message après avoir découvert votre blog via celui d'E. Viennot.
    En effet, je suis actuellement en M2 recherche en SIC et après un premier mémoire sur les Serious Game (et plus précisément la nécessité d'une relation filiale avec les jeux vidéo) je songe très fortement à m'intéresser au Storytelling digital pour mon mémoire de 2nde année (et plus hypothétiquement en thèse).
    J'espère donc que ce blog continuera :) et qu'à l'occasion, il sera possible de discuter autour de ce sujet (et de moult autres).

    Cordi@lement.

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